A l’occasion de la semaine de l’innovation numérique au Cameroun, nous vous emmenons au cœur d’une nouvelle forme de lutte pour l’indépendance du continent africain. Lisez très attentivement ce qui va suivre. |
Depuis l’arrivée d’internet en Afrique dans les années 90, les besoins de consommation des africains en matière de technologie croissent de façon exponentielle. Aujourd’hui, avec les multiples avantages stratégiques qu’offre le numérique, la quasi-totalité des états Africains œuvrent, chacun à son rythme pour la digitalisation de leurs différents secteurs d’activités.
Cependant, plus de la moitié des données stratégiques des pays Africains sont stockés dans des Cloud des multinationales Américaines et chinoises (Google, Amazon, Facebook, Microsoft, alibaba, etc…). En effet, ces multinationales étrangères ont très vite compris que les pouvoirs politiques et économiques de tous les États du monde résident dans la maitrise des bases de données.
En d’autres termes parvenir à collecter et stocker les données de la police, de l’armée, des individus, des administrations publiques et privées d’un État revient à contrôler celui-ci.
Eu égard aux multiples attaques de piratage des données que ces entreprises subissent régulièrement, nous sommes en droit de nous interroger quant à la sécurité des données individuelles et collectives que nous partageons (inconsciemment), lors de nos différentes balades sur internet.
Vous l’avez sans doute compris, nous sommes là en face d’une nouvelle forme de colonisation. Et chaque état Africain doit en prendre conscience et tout mettre en œuvre pour acquérir ce qu’il est convenu d’appeler une souveraineté numérique.
Mais de quoi s’agit-il exactement ?
Lorsqu’on parle de souveraineté numérique, il y’a tout d’abord la notion de souveraineté, qui est décrite comme étant le Pouvoir suprême reconnu à un État de faire ses lois et de les mettre en pratique dans les limites de son territoire. Ainsi, un État souverain s’oppose à une colonie, qui n’a pas le contrôle exclusif de son territoire.
Cependant, la croissance fulgurante du numérique en Afrique et dans le monde a donné naissance à un grand espace virtuel « sans frontières » surnommé le cyberespace. Et qui est venu fragiliser la souveraineté difficilement acquise des États Africains.
Au vu de tout ce qui précède, nous pouvons aisément présenter la souveraineté numérique d’un pays comme étant sa capacité à stocker et protéger les données collectives et individuelles de ses habitants, collectées sur les sites internet de différentes entreprises avec ou sans l’autorisation des utilisateurs.
Autrement dit, la notion de souveraineté numérique réside dans le fait selon lequel, les données personnelles stockées sur Internet doivent être conservées dans le pays où réside la personne et doivent ainsi être soumises à la loi du pays en question.
Malheureusement ce n’est pas le cas pour la plupart des pays africains qui, ne mesurent pas encore pleinement l’impact de tous les enjeux tapis autour du numérique et qui sont de plusieurs ordres :
Sur la sécurité nationale :
Nous notons ici, les risques de cybercriminalité, de piratage, de manipulation, de sabotage, de terrorisme, etc… Aujourd’hui, la sécurité informatique est devenue un enjeu de sécurité nationale. Les États, les entreprises et les citoyens sont, chaque jour, confrontés à des menaces majeures (usurpation d’identité, fraude à la carte bancaire, terrorisme, etc.).
On se souvient encore du scandale Facebook-Cambridge Analytica lorsque les données collectées à l’insu des utilisateurs avaient été utilisées pour influencer les intentions de votes aux USA.
L’un des enjeux majeurs de la souveraineté numérique est donc de rendre le cyberespace plus sûr pour les citoyens comme pour les entreprises et l’État.
Sur le plan politique :
La souveraineté numérique est un moyen pour l’administration et les institutions de renforcer la confiance des citoyens vis-à-vis de l’État, et de participer à leur protection ainsi qu’à la protection de leurs vies privées et de leurs données personnelles. Elle doit également permettre la protection des infrastructures critiques pour les États.
Les enjeux sur le plan stratégique :
Ici, la souveraineté numérique permettrait aux États africains d’éviter et surtout de stopper la fuite des données hautement stratégiques vers l’étranger. Notamment la chine, la France et les États-Unis. Il est important pour chaque pays de conserver une capacité autonome d’appréciation, de décision et d’action quant aux données de ses citoyens. Enfin, il est indispensable de préserver la souveraineté nationale face aux nouvelles menaces générées par la numérisation croissante de la société.

Des enjeux sur le plan économique :
Aucune société n’est à l’abri de l’espionnage scientifique, économique et commercial. La protection des entreprises Africaines et la confidentialité de leurs données sont donc essentielles. D’où l’importance de s’assurer que ces données restent hébergées sur le sol Africain. La souveraineté numérique est aussi un moyen de lutter contre le rachat et l’utilisation des données à des fins commerciales et marketing, sans le consentement des personnes concernées.
Au demeurant, tant que nous n’aurons pas acquis notre souveraineté numérique, nous ne pourrons jamais gagner cette guerre économique qui est en train de se dérouler sur le continent Africain. Et cela, la chine l’a bien compris c’est la raison pour laquelle, elle possède ses propres moteurs de recherche, ses sites internet d’informations, ses réseaux sociaux, ses applications mobiles. Mieux encore le gouvernement chinois a interdit l’utilisation des GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Microsoft) sur toute l’étendue de son territoire : C’est cela qu’on appelle mener une véritable guerre économique. Et tous les pays Africains devraient suivre cet exemple.